ÉDUCATION CIVIQUE, JURIDIQUE ET SOCIALE EN CLASSE DE SECONDE
GÉNÉRALE ET TECHNOLOGIQUE
A. du 1-7- 2002. JO du 10-7-2002 NOR : MENE0201541A RLR : 524-5 MEN - DESCO A4Vu code de l'éducation, not. art.
L. 311-1 à L. 311-3 et L. 311-5 ; D. n° 90-179 du 23-2-1990 ; A. du 18-3-1999
mod. ; avis du CNP du 27-6-2000 ; avis du CSE du 6-6-2002Article 1 -
Le programme de
l'enseignement commun d'éducation civique, juridique et sociale en classe de
seconde générale et technologique est fixé conformément à l'annexe du présent
arrêté. Article 2
- Le directeur de
l'enseignement scolaire est chargé de l'exécution du présent arrêté, qui sera
publié au Journal officiel de la République française.
Fait à
Paris, le 1er juillet 2002 Pour le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la
recherche et par
délégation, Le
directeur de l'enseignement scolaire Jean-Paul de GAUDEMAR
Annexe
PRINCIPES GÉNÉRAUX
Au
sein du dispositif de rénovation des lycées, la création d'un enseignement
d'éducation civique, juridique et sociale (ECJS) dans chacune des trois classes
de seconde, première et terminale des lycées d'enseignement général et
technologique, ainsi que dans les lycées professionnels, constitue une des
principales innovations. Le nombre d'heures qui lui est globalement accordé
étant modeste, c'est dans ses objectifs et par ses méthodes que cette innovation
doit être significative. Concourir à la formation de citoyens est une des missions fondamentales
du système éducatif. On ne peut oublier que c'est au lycée qu'une partie des élèves atteignant
leur majorité civile, va se trouver confrontée au droit de vote qui en découle
ou à l'absence de ce droit pour les étrangers, aux questions que ces différences
soulèvent, à la décision d'exercer ce droit et de mesurer la portée de ce
choix. Au-delà de
cette réalité hautement symbolique, la citoyenneté a bien d'autres dimensions
dont le lycée doit permettre la compréhension avec l'aide de l'enseignement de
l'ECJS.
Que signifie "éduquer à la citoyenneté" dans un système
scolaire ? Deux réponses sont possibles. - L'une consiste à faire de la citoyenneté un objet d'étude
disciplinaire, au même titre que les mathématiques, la physique, la littérature
etc. ; la citoyenneté s'apprendrait à l'école avant de s'exercer dans la vie du
citoyen. Ce choix correspond pour l'essentiel à la conception traditionnelle
d'une instruction civique, en tant qu'inculcation de principes à mettre en actes
dans un temps différé plus ou moins lointain. Elle a eu sa place dans le système
éducatif : les missions du lycée, fréquenté par une petite minorité, n'étaient
pas celles qui lui sont assignées aujourd'hui. - L'autre réponse part de l'idée que
l'on ne naît pas citoyen mais qu'on le devient, qu'il ne s'agit pas d'un état,
mais d'une conquête permanente ; le citoyen est celui qui est capable
d'intervenir dans la cité : cela suppose formation d'une opinion raisonnée,
aptitude à l'exprimer, acceptation du débat public. La citoyenneté est alors la
capacité construite à intervenir, ou même simplement à oser intervenir dans la
cité. Cette
dernière réponse peut être mise en œuvre au lycée aujourd'hui. Deux conditions
essentielles sont réunies : l'une correspond aux attentes des élèves telles
qu'elles se sont exprimées au travers des consultations sur les savoirs ;
l'autre s'inscrit dans la continuité de ce qui a été enseigné en éducation
civique au collège, et permet de montrer les dimensions sociale, éthique et
politique de certains savoirs enseignés au lycée. De nombreux professeurs ont
exprimé leur intérêt pour cette démarche et leur désir d'y
contribuer.
Lorsqu'une pratique éducative consiste à transmettre un
savoir sous forme d'une succession d'évidences sanctionnées par les autres,
l'élève apprend en outre autre chose que ces contenus : il apprend que le savoir
est détenu par des autorités, il a la tentation de ne le recevoir que
passivement, il commence par admettre qu'il peut être délégué à "ceux qui
savent". Appliquée à l'ECJS, une telle pratique formerait des citoyens passifs,
percevant le savoir comme déconnecté de ses enjeux sociaux, économiques et
politiques. Certes, on ne crée pas le savoir, on le reçoit ; il est énoncé et
validé par quelqu'un qui fait autorité. Mais le savoir n'est pas seulement
quelque chose de transmis ; on doit aussi se l'approprier. L'élève pourra
exercer sa citoyenneté grâce au savoir, mais un savoir reconstruit par lui, dans
une recherche à la fois personnelle et collective. L'éducation civique, juridique et
sociale doit être abordée comme un apprentissage, c'est à dire l'acquisition de
savoirs et de pratiques. Grâce à ce processus doit s'épanouir, à terme, un
citoyen adulte, libre, autonome, exerçant sa raison critique dans une cité à
laquelle il participe activement. Ainsi se constitue une véritable morale
civique ; celle-ci contient d'abord une dimension civile fondée sur le respect
de l'autre permettant le "savoir-vivre ensemble" indispensable à toute vie
sociale, mais elle suppose aussi une nécessaire dimension citoyenne faite
d'intérêt pour les questions collectives et de dévouement pour la chose
publique. L'école
(le lycée ici) n'est pas et ne peut pas prétendre être le seul lieu d'un tel
apprentissage : elle doit y prendre, à côté d'autres, toute sa place. L'ECJS ne
doit ni prétendre se substituer, ni accepter d'être considérée comme
substituable à la formation qui résulte de pratiques citoyennes, au lycée et
hors du lycée. Elle s'ouvre largement à la découverte et à l'étude de ces
pratiques. L'éducation civique, juridique et sociale n'est donc pas, parmi d'autres
enseignements, une discipline nouvelle. A quelques exceptions près, l'ECJS n'a
pas à ajouter de savoirs aux connaissances acquises dans les principales
disciplines enseignées au lycée. Elle peut, de surcroît, se fonder sur les
acquis du collège en matière d'éducation civique, dont les programmes, désormais
complets, préparent à cette nouvelle approche en combinant de solides bases en
matière institutionnelle à l'initiation à des réflexions personnelles. Il s'agit
donc d'organiser le croisement et le dialogue de ces savoirs autour du concept
intégrateur de citoyenneté. Le seul savoir nouveau auquel il faut initier les élèves,
grâce à l'ECJS, concerne le droit, trop ignoré de l'enseignement scolaire
français. Il s'agit de faire découvrir le sens du droit, en tant que garant des
libertés, et non d'enseigner le droit dans ses techniques.
Mobilisant
un ensemble de connaissances disponibles, l'ECJS doit satisfaire la demande
exprimée par les lycéens lors de la consultation de 1998 sur les savoirs, de
pouvoir s'exprimer et débattre à propos de questions de société. Le débat
argumenté apparaît donc comme le support pédagogique naturel de ce projet, même
s'il ne faut pas s'interdire de recourir à des modalités pédagogiques
complémentaires. Faire le choix du débat argumenté n'est ni concession démagogique faite
aux élèves ni soumission à une mode ; c'est choisir une méthode fructueuse. Le
débat argumenté permet la mobilisation, et donc l'appropriation de connaissances
à tirer de différents domaines disciplinaires : histoire, philosophie,
littérature, biologie, géographie, sciences économiques et sociales, physique,
éducation physique... notamment, mais non exclusivement. Il fait apparaître
l'exigence et donc la pratique de l'argumentation. Non seulement il s'agit d'un
exercice encore trop peu présent dans notre enseignement, mais au-delà de sa
technique, il doit mettre en évidence toute la différence entre arguments et
préjugés, le fondement rationnel des arguments devant faire ressortir la
fragilité des préjugés. Il doit donc reposer sur des fondements scientifiquement
construits, et ne jamais être improvisé mais être soigneusement préparé. Cela
implique qu'il repose sur des dossiers élaborés au préalable par les élèves
conseillés par leurs professeurs, ce qui induit recherche, rédaction, exposés ou
prises de parole contradictoires de la part d'élèves mis en situation de
responsabilité et, ensuite, rédaction de comptes rendus ou de relevés de
conclusions. Le
débat doit reposer sur le respect d'autrui et donc n'autoriser aucune forme de
dictature intellectuelle ou de parti pris idéologique. Il est une occasion
d'apprendre à écouter et discuter les arguments de l'autre et à le reconnaître
dans son identité. Un tel dispositif favorise les adaptations. Le même thème du programme
pourra être abordé en fonction des activités ou des préoccupations propres à
chaque classe. Les événements de l'actualité pourront être tout à la fois pris
en compte et mis à distance. Le dossier documentaire sur lequel se fonde le débat est le
témoin de la progression de cette démarche. Il peut prendre des formes variables
: présentation de textes fondateurs ou de textes de loi, sélection d'articles de
presse, collecte de témoignages, recherche ou élaboration de documents
photographiques, sonores ou vidéo. C'est ici que l'ECJS peut utiliser toutes les
modalités interactives de la recherche documentaire actuelle. Quelques exemples
sont soulignés dans le programme de chaque classe, sans leur donner un caractère
limitatif qui serait contraire à la liberté pédagogique des
professeurs. Le
lien avec l'autre innovation que constituent les "Travaux Personnalisés
Encadrés" (TPE) est ici évident et devra être exploité.
Dans le
cadre de la liberté des choix pédagogiques, les élèves doivent acquérir des
méthodes à travers lesquelles ils seront initiés à l'étude des règles juridiques
et des institutions. On peut ainsi, à propos de situations concrètes, enseignées
ou vécues, et sans préjuger de l'usage d'autres pratiques, identifier trois
moments remarquables.
- Le premier moment étudie les
circonstances et les conditions de l'invention de la règle ou de l'institution.
On a trop tendance à oublier l'origine et l'histoire des règles. Leur genèse
doit être mise au jour. Ainsi, pour la famille, les règles qui guident
l'autorité parentale à laquelle tout enfant est soumis se sont transformées à
travers le temps, particulièrement au cours des trois dernières décennies,
déterminant son exercice actuel. De même, les règles qui déterminent les
relations du travail ne peuvent être comprises qu'en connaissant les contextes
et conflits qui, depuis un siècle, ont construit et construisent encore le droit
du travail. L'histoire est donc ici très particulièrement mobilisée ; étudier
les conditions de naissance d'une règle, en montrant qu'elle est une production
historique et non un a priori absolu, contribue à humaniser la règle de droit :
ce n'est plus un dogme mais une règle de vie. L'institution scolaire peut aussi
servir d'objet d'étude : ainsi, le règlement intérieur du lycée peut être
analysé et étudié quant à ses origines et son actualité, assurant le lien avec
les enseignements du collège.
- Le deuxième moment privilégie
l'étude des usages de la règle par les acteurs sociaux concernés. La règle n'est
pas nécessairement utilisée comme ses inventeurs l'avaient imaginé : la pratique
d'une règle peut s'éloigner des principes qui ont guidé sa fondation. Il faut
donc conduire l'élève à se demander pourquoi les acteurs sont amenés à utiliser
une règle dans un sens plutôt que dans un autre. On montrera alors qu'une même
règle peut avoir des utilisations différentes selon les contextes économiques et
sociaux, selon les époques ou selon les pays. Les apports de l'histoire, des
sciences économiques et sociales, du français (notamment à travers la lecture de
textes d'actualité) seront mis à contribution. La législation américaine
antitrust, adoptée à la fin du XIXème siècle, fut utilisée à l'époque
essentiellement contre les syndicats ouvriers : elle pourrait ainsi être
confrontée aux législations et procès contemporains contre les monopoles
qu'illustre le cas des multinationales de l'informatique. La géographie
introduit à la notion d'espace et à la mise en évidence des intérêts, privés ou
publics, individuels ou collectifs, qui peuvent se manifester à son propos.
Ainsi une zone franche, avec les dérogations qu'elle implique, peut favoriser un
quartier classé sensible, ou être utilisée comme un paradis fiscal. Hors d'un
champ disciplinaire particulier, l'école peut offrir à nouveau de nombreuses
illustrations de ces comportements.
- Le
troisième moment s'attache aux discours produits sur les règles. Chaque époque
produit des discours qui tentent de justifier rationnellement les règles
existantes. D'une époque à une autre, d'un lieu à un autre, ces discours peuvent
différer jusqu'à être contradictoires. L'ECJS en tant qu'éducation à la
citoyenneté doit conférer la capacité à analyser les discours existants. C'est
cette fois sur les objectifs fixés par le programme de l'enseignement du
français au lycée ("approfondir la maîtrise du discours") que l'ECJS peut se
fonder, tout en recourant à des exemples relevant des autres disciplines déjà
mentionnées, comme l'histoire. On peut ainsi renouveler la perception de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qu'il sera opportun de
reprendre à cette occasion, en découvrant qu'elle a donné lieu à des lectures
différentes en 1789 et lors des commémorations de 1889 ou de 1989. Le citoyen
doit pouvoir les identifier et les décrypter s'il veut s'approprier pleinement
ce texte fondateur. On trouverait, ici encore, à propos du lycée, de nombreuses
illustrations ; ainsi des discours produits sur l'école par différents
protagonistes, hommes politiques et partis, syndicats, parents d'élèves,
etc. Les modalités
matérielles de mise en œuvre de l'ECJS doivent donc être au service de ces
ambitions. Sans ignorer les difficultés pratiques que peuvent rencontrer les
chefs d'établissement pour y parvenir, les regroupements de l'horaire
réglementaire sont essentiels pour permettre la réalisation du travail
qu'impliquent ces programmes. Le choix de huit séquences mensuelles de 2 heures
chacune est hautement souhaitable ; il est adapté aux modalités pédagogiques
décrites ici, tant par son rythme (temps de préparation et de suivi des
dossiers) que par la durée des séances nécessaire pour que le maximum d'élèves
puisse participer au débat. À défaut, le rythme de l'heure par quinzaine ne peut
être considéré que comme un pis-aller. De très nombreux professeurs, par leur savoir, leur
culture, leur implication dans la vie du lycée, ont vocation à contribuer à cet
enseignement. La participation d'intervenants extérieurs, témoins dans un champ
social étudié, est évidemment souhaitable. Les responsables des établissements
doivent favoriser ces pratiques ; cela implique que cet enseignement devant être
organisé dans toutes les classes et filières de leurs lycées, ils encouragent et
si possible organisent coordination, échanges d'expériences et mise en commun de
séquences pédagogiques.
L'architecture d'ensemble du
programme, sur les trois années du lycée, consiste à redécouvrir par l'analyse
la notion de citoyenneté, à en étudier les principes, modalités et pratiques, et
à la confronter aux réalités du monde contemporain. Il est naturel que l'accent
soit mis sur des aspects différents de cette problématique dans chacune des
classes du lycée. En classe de seconde : "De la vie en société à la citoyenneté"
La découverte de
la citoyenneté se fait à partir de l'étude de la vie sociale que l'élève peut
comprendre pour remonter, par analyse, à sa source politique et à sa
construction dans le temps. Des objets d'étude, choisis dans la vie sociale,
servent de base à ce travail et permettent de faire découvrir par les élèves une
ou plusieurs dimensions de la citoyenneté. Par là, on approfondit et enrichit ce
qui a été acquis au collège. En classe de première : "Institutions et pratiques de la
citoyenneté" L'étude de la citoyenneté permet l'analyse du fonctionnement des
principales institutions politiques de la cité. Les grands principes
constitutionnels ouvrent sur les institutions de la démocratie avec les partis
politiques, les systèmes électoraux et les libertés publiques. La présentation
des institutions judiciaires peut être faite à partir de divers niveaux
intéressant particulièrement les classes concernées (prud'hommes et législation
du travail, tribunal de commerce et technologies de la vente, autorité légitime
et tribunaux d'exception par exemple). La diversité des conceptions, des
institutions et des pratiques de la citoyenneté est appréhendée, par une méthode
comparative, dans le temps et dans l'espace. En classe terminale : "La citoyenneté
à l'épreuve des transformations du monde contemporain" La confrontation de la citoyenneté aux
grandes transformations du monde contemporain permet de déboucher, hors de toute
intention polémique, sur des thèmes faisant débat, par exemple les différentes
conceptions de l'égalité, le rôle des médias, l'indépendance de la justice, ou
sur des questions résultant des évolutions familiales, scientifiques ou
sociales. On aborde aussi les problèmes posés par l'unification européenne et la
mondialisation avec leur impact sur les institutions politiques. On traite
notamment le thème de "la défense et la paix" sur lequel le système éducatif
s'est engagé à faire réfléchir les élèves dans le cadre de la fin du système de
conscription.
L'évaluation de l'éducation civique,
juridique et sociale doit refléter les particularités de cet enseignement. Ne
comportant pas ou très peu de nouveaux savoirs, les programmes ne sauraient être
présentés exclusivement sous forme de listes de contenus. Ils mettent l'accent
sur des objectifs et sur l'acquisition de méthodes. Les documents
d'accompagnement suggèrent, sans les imposer, des exemples pour leur mise en
œuvre. L'évaluation doit tenir compte d'une part de ce que cet enseignement
n'est pas censé apporter de savoirs fondamentalement nouveaux par rapport à ceux
qui sont acquis dans les autres disciplines, d'autre part de la pédagogie
particulière qui y est mise en œuvre. L'évaluation durant les classes de seconde, première et
terminale porte d'une part sur l'investissement et la qualité des travaux
produits par les élèves avant et après la séquence, d'autre part sur les acquis
qui auront été assimilés lors de chaque séquence. Les professeurs s'assurent de
la maîtrise des notions recensées dans chaque programme.
PROGRAMME DE SECONDE
"De la vie en société à la
citoyenneté"
I
- Objectif général de la classe de seconde
Étudier dans toutes ses dimensions la citoyenneté et son exercice dans la
société constitue l'axe de l'éducation civique, juridique et sociale (ECJS) dans
les trois niveaux du lycée. L'objectif de cet enseignement en classe de seconde
consiste à redécouvrir cette notion de citoyenneté, déjà définie au collège, en
partant de la vie en société.
Cette confrontation au réel est une
mise à l'épreuve. Elle permet l'appropriation active de cette notion. On partira
donc de la vie sociale, saisissable par l'élève, pour remonter à sa source
politique. Quel que soit le domaine de la vie sociale considéré, les individus
rencontrent les règles collectives qui organisent leur vie en société et
définissent les droits et les devoirs de chacun, les institutions chargées de
les mettre en œuvre et de les faire respecter, les sanctions contre ceux qui
enfreignent ces règles.
L'apprentissage de la citoyenneté
implique que le citoyen connaisse ces règles, sache d'où elles viennent et les
valeurs qui les fondent. Cet apprentissage suppose d'en appréhender la diversité
des pratiques dans le temps comme dans l'espace, et d'être éventuellement
capable de les critiquer. La démarche privilégiée consiste donc à choisir des objets d'étude dans
la vie sociale pour faire découvrir par les élèves une ou plusieurs dimensions
de la citoyenneté, à travers, notamment, la préparation et la tenue d'un débat
argumenté. Au terme
de ce travail, on vérifie si les élèves ont acquis les notions qui fondent la
citoyenneté.
II - Thèmes et notions
Afin
de limiter les risques d'une trop grande dispersion, quatre thèmes sont proposés pour servir d'entrée dans le programme de la
classe de seconde. Ils permettent d'appliquer la démarche retenue : partir de la
vie en société pour illustrer une dimension de la citoyenneté. Ce sont
: Citoyenneté et
civilité Citoyenneté et intégration Citoyenneté et travail Citoyenneté et transformation des
liens familiaux
On utilisera, au choix, un ou
plusieurs de ces quatre thèmes qui ne sont pas énoncés dans un ordre
contraignant. Un document d'accompagnement présente des illustrations possibles
de la méthode préconisée. Il montre que le même thème peut être utilisé de
plusieurs manières, suggérant qu'au fil du temps, ces illustrations pourront se
périmer ou s'enrichir de matériaux fournis par l'actualité ainsi que des
pratiques et innovations des professeurs.
À partir
du travail sur l'un ou plusieurs de ces thèmes, les sept notions suivantes doivent être abordées et avoir reçu une première
définition : Civilité Intégration Nationalité Droit Droits
de l'homme et du citoyen Droits civils et politiques Droits sociaux et économiques
Ces
notions, présentes dans les programmes du collège et des autres disciplines de
la classe de seconde, permettent de comprendre le sens de la citoyenneté en
partant des expériences des élèves et de leurs
représentations. Au
terme de la classe de seconde, une synthèse des différents acquis se réalisera
autour de la définition de la citoyenneté.
III - Démarche
Parmi les méthodes pédagogiques mobilisables pour cet
enseignement, il y a lieu de privilégier l'organisation de débats argumentés :
ils placent l'élève en situation de responsabilité. Choisir de les conduire à
partir de matériaux fournis par l'actualité renforce la dimension pratique et
l'intérêt concret de l'enseignement de l'ECJS.
1 - Le
débat argumenté Méthode pédagogique privilégiée mais non exclusive, elle peut s'ordonner
selon les étapes suivantes : - Choix d'un thème avec les élèves, ce qui nécessite de le
justifier par rapport à l'étude de la citoyenneté. - Organisation du travail préparatoire
au débat avec division du travail, travail de groupes et coordination. On peut
mobiliser des techniques variées selon le sujet abordé : dossier de presse,
recherche de documents historiques ou juridiques, recherche sur cédérom ou sur
l'Internet, enquête avec visites ou entretiens, contact avec des personnes
qualifiées, rédaction d'argumentaires, etc. - Tenue du débat de façon concertée
entre élèves et professeurs (choix d'un président de séance, de rapporteurs,
présentation des argumentaires fondés sur des dossiers construits, prises de
parole contradictoires, prise de notes, etc.). Les professeurs veillent au
respect des règles du débat. Par leurs interventions et la reprise finale, ils
clarifient les positions en présence et leurs enjeux. Ils les relient aux
notions du programme et les mettent en perspective. - Synthèse orale et écrite et
éventuelle diffusion des travaux de la classe (cahiers, exposition, débat dans
le lycée, etc.). Le
respect des conditions et des règles du débat, en particulier la recherche qu'il
suppose d'un accord fondé en raison, constitue déjà en lui-même un apprentissage
pratique de ce qui fonde la citoyenneté.
2 -
Utiliser et traiter l'actualité en classe L'actualité locale, nationale et
internationale fournit de nombreux matériaux qui permettent aux enseignants de
construire un débat sérieux sur un sujet civique, politique, juridique ou social
mettant en évidence une dimension de la citoyenneté. Le choix d'un événement ou d'une
combinaison d'événements dans l'actualité doit répondre à deux soucis : d'une
part être susceptible d'intéresser les élèves, d'autre part permettre d'éclairer
une des dimensions de la citoyenneté. Dans le choix des priorités, il ne faut
donc pas nécessairement obéir à l'agenda des médias mais saisir dans les
événements ceux qui peuvent correspondre à ces objectifs. - Diversifier les sources pour
attester de la réalité des faits. La première tâche face à un événement consiste à confronter
les sources d'information pour, en les croisant, attester de la réalité de ce
qui va être étudié. L'événement brut n'existe pas en lui-même, il n'existe qu'à
travers le médium qui le fait connaître et il est différemment reçu selon les
représentations dominantes du moment. Prendre de la distance par rapport aux
faits communiqués est donc essentiel à l'éducation du citoyen. La constitution
d'un dossier de presse, en évitant une accumulation inutile, doit permettre ce
croisement des sources, dont on connaît l'importance dans l'investigation
historique. -
Replacer l'événement dans une chaîne historique. La deuxième tâche consiste à insérer
l'événement étudié dans son contexte spatio-temporel. Cela suppose des
recherches indispensables à la compréhension des faits, en mobilisant les
méthodes comparatives des sciences humaines et sociales. On peut ainsi
contribuer à relativiser la portée affective ou passionnelle des événements au
profit d'une analyse plus rationnelle. Un des obstacles à l'étude sérieuse de
l'actualité tient à la tyrannie du présent qui chasse de la mémoire immédiate
les événements précédents ; le travail de recherche permet ainsi de limiter cet
effet en replaçant les faits dans une chaîne historique. - Repérer et analyser les
interprétations divergentes et contradictoires. La troisième tâche consiste à
identifier les différentes interprétations produites sur le même événement. Les
faits précis mis en lumière ou occultés, les arguments choisis ou réfutés ou
ignorés, le choix des mots, la hiérarchie des termes, sont autant d'éléments
d'analyse des discours tenus, qui seront ici très utiles. - Partir de l'événement pour aboutir à
des notions de programme. Ainsi éclairée par une étude sérieuse, l'actualité doit permettre de
donner toute son importance à une des dimensions de la citoyenneté qui sera
ainsi découverte par les élèves de manière beaucoup plus
incarnée. Les
thèmes d'entrée dans le programme peuvent être utilement saisis par un événement
tiré de l'actualité récente.
IV - Évaluation
Au
terme de la classe de seconde, l'élève doit donc s'être approprié la notion de
citoyenneté, à partir d'exemples pris dans la vie en société, et avoir compris
que la citoyenneté est une construction historique et démocratique. L'évaluation
en découle. La
pédagogie mise en œuvre fait appel à la mobilisation de l'élève dans des
activités aussi diverses que la constitution d'un dossier de presse, la
recherche de textes historiques ou de textes de loi, la consultation de
résultats d'enquêtes, la mise en cohérence d'un dossier documentaire, la
réalisation d'enquêtes personnelles, voire d'entretiens, la préparation d'un
argumentaire, la prise de parole ordonnée, la présentation de petits mémoires,
la présidence ou la synthèse d'un débat, la prise de parole contradictoire dans
le respect de l'autre, etc. Quelques-unes seulement de ces compétences pourront
être mises en œuvre dans le temps imparti à cet enseignement par tel ou tel
élève, mais toutes ces activités peuvent être valorisées. Les productions
écrites ou orales des élèves servent de support à l'évaluation.
En fin d'année,
les acquis des élèves sur les notions constitutives du programme de cette classe
pourront être mesurés.
V - Orientation principale des thèmes
1.
Citoyenneté et civilité La vie quotidienne dans la cité fournit des occasions de
réflexion sur la nécessaire civilité des rapports humains en tant que première
condition de l'exercice de la citoyenneté. On peut le montrer à partir de
l'étude de manifestations d'incivilité ; on peut aussi utiliser différents faits
de la vie sociale. La citoyenneté ne se réduit pas à la simple civilité. Elle implique la
participation à une communauté politique.
2.
Citoyenneté et intégration L'exercice de la citoyenneté suppose que les individus
concernés participent à la vie sociale. En analysant l'intégration et ses
défauts, on contribue à définir et à distinguer les notions d'intégration et de
citoyenneté. Par intégration, on désigne toutes les formes de participation à la
vie collective par l'activité, le respect de normes communes, les échanges avec
les autres, les comportements familiaux, culturels et religieux.
On montre ainsi
que la réflexion sur la citoyenneté doit prendre en compte l'enracinement social
des individus.
3. Citoyenneté et
travail Dans
les sociétés modernes, le travail est un des vecteurs essentiels de
l'intégration sociale ; c'est pourquoi chômage et pauvreté peuvent porter
atteinte à l'exercice de la citoyenneté. Par ailleurs, la citoyenneté ne s'arrête pas aux portes de
la vie au travail. Quelles que soient les contraintes de l'organisation de la
production, celui qui travaille est un citoyen : à ce titre, il dispose d'une
série de droits civils, politiques, sociaux, etc. On peut donc analyser à
travers ce thème la portée de la citoyenneté dans le monde du travail.
4. Citoyenneté et transformation des liens
familiaux Il
s'agit de comprendre les droits et obligations qui concernent le citoyen dans la
vie familiale. Les
transformations de la vie familiale suscitent des interrogations sur l'évolution
des droits et obligations qui organisent les rapports entre conjoints et entre
parents et enfants.
N.B. Un document à l'usage des
professeurs accompagne la mise en œuvre de l'ensemble des
programmes.