"J'apprends à vivre caché. J'apprends à tout cacher au fond de moi-même. Mes pensées, mes plaintes, mes peurs. Je cache mon nez en bec d'aigle. Je cache mon pipi juif aux enfants de l'entourage. Je cache aussi ma couverture mouillée de la dernière nuit. Mouillée, mais non pas par mes larmes. Je cache mes prières dites à voix basse, pour moi, dans mon grenier. Je cache mes causeries avec la vache Laïké. Je cache mon enfance, mes actes, mes pensées, les mensonges et tout le monde imaginaire. Je vis caché en moi-même, loin des autres. Je tremble de peur sous ma couverture trempée de pipi. Je suis fait de cette peur. Qui sont-ils, tous ceux-là? Qui sont les visiteurs de mes nuits?
La nuit change de forme quand la peur me visite. Je suis dans la vallée des ténèbres. La peur est la mienne, faite de ma chair, de mes os. La peur de la nuit. De l'obscurité. La peur de la cour endormie. La peur de la peur qui monte au grenier. Elle approche lentement. En silence. Elle s'installe. Mon corps la remplit. La nuit et la peur conspirent contre moi. La nuit. La peur. Et leurs invités ont envahi ma couche. Ombres. Ombres aux grandes oreilles. Aux yeux étincelants. La lune les transforme en nains répugnants."
                                                                                                 .Maurice.

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